Un guide à la première personne pour la famille et les amis sur ce que l’on ressent à l’intérieur d’une dépression de plusieurs mois et les changements accablants dans la pensée et le comportement.
Voici le témoignage d’une femme que l’on appelle Aude. (Ce n’est pas son vrai prénom)
Personnellement je comprends très bien la métaphore d’être pris dans un étau car il est parfois compliqué de savoir comment s’en sortir.
Début du témoignage d’Aude :
J’ai lutté pendant des mois contre une dépression bipolaire qui m’étouffait. J’avais l’impression de suffoquer. La lourdeur semblait affecter même ma respiration : je devais faire un effort conscient pour chaque respiration.
J’avais l’impression que quelqu’un avait éteint l’interrupteur, et que mon esprit et mon corps étaient plongés dans une obscurité totale.
Je sais que cela semble difficile à imaginer pour une personne qui n’a pas vécu une telle expérience. De l’extérieur, il peut sembler difficile de comprendre pourquoi plus de volonté ou d’autodiscipline ne suffisent pas à se sortir de cet état. Voici donc quelques éléments que j’aimerais faire connaître à mes amis et aux membres de ma famille pour qu’ils puissent mieux comprendre.
Mon dialogue interne est devenu extrêmement négatif. Je n’étais pas (et ne suis toujours pas) capable de travailler, donc je dois être sans valeur. C’est du moins ce que me disaient mes pensées.
Plus mon esprit s’emballait de pensées négatives, plus ma dépression s’aggravait.
« La dépression est un menteur. » J’ai entendu cela tellement de fois. Je crois que c’est absolument vrai. Mais c’est un menteur très convaincant.
« La dépression est une voi intérieur qui nous dénigre constamment.
En fait, c’est un menteur si convaincant que j’ai commencé à croire ses mensonges. Que je ne méritais pas mes amis ou ma famille. Que je ne méritais pas d’être aimé. Que je ne méritais pas d’être heureux. Croire les mensonges que la dépression vous raconte est très dangereux.
Si c’était une autre personne qui luttait, je crois que je trouverais de la compassion et de l’empathie pour elle. Mais je ne pouvais pas le faire pour moi-même.
Un épisode dépressif est l’un des moments où il n’est pas utile d’être perfectionniste. Quand le fait d’être dur avec moi-même et d’avoir une attitude de « courage » fait plus de mal que de bien. J’ai ignoré les conseils des gens qui me conseillaient d’y aller doucement avec moi. D’être gentille. D’être douce. Mon discours personnel était le suivant : « Je ne suis pas indulgente avec moi-même. C’est comme ça que je réussis. C’est comme ça que j’ai survécu aussi longtemps. »
Pendant cette dépression, je n’étais pas non plus aussi gentil avec les autres. Je suis généralement une personne très patiente. Calme et aimant s’amuser. Au lieu de cela, j’étais irritable, d’humeur rapide et je m’isolais de moi-même.
Ces changements de comportement m’ont causé encore plus de détresse et d’autocritique. Ils contrastaient tellement avec ma personnalité habituelle qu’ils m’effrayaient parfois. J’ai fini par comprendre que ces traits de caractère faisaient partie de mes symptômes dépressifs, que je n’étais pas en train de devenir une sorte d’horrible personne.
Après m’être noyé dans les mensonges de la dépression, avoir cru à mon désespoir, à mon inutilité et à mon échec général en tant que personne, quelque chose a changé. Les doses de médicaments ont été ajustées. Le traitement a été poursuivi. Ma dépression s’est atténuée.
Pour moi, c’était comme si les lumières s’étaient rallumées. Tout à coup. De la légèreté. La sensation d’étouffement s’est envolée. Les pensées d’automutilation ont disparu. J’ai vu les mensonges que la dépression me racontait… et je ne les ai plus écoutés.
Pour moi, le rétablissement signifiait être capable de rire à nouveau, de dormir à nouveau. Plus de pleurs, plus de pensées suicidaires. Me réadapter à une alimentation plus saine.
Le gâchis financier et la perte d’emploi ont été plus difficiles à gérer. Mais avec la dépression derrière moi, même les parties les plus endommagées de ma vie semblaient réparables.
Mon espoir pour l’avenir est que j’ai toujours ces personnes qui ne m’abandonnent jamais. Qui viennent me faire un câlin, même si je n’ai pas pris de douche depuis des jours. Qui disent la vérité et m’avertissent de la façon dont la dépression trompe.
J’espère que je serai plus douce et plus gentille avec moi-même. Que je continue à persévérer. Que je me souvienne que la lumière revient. Que je pourrai respirer à nouveau.
Ce témoignage m’a beaucoup touché car il explique assez bien ce que nous pouvons ressentir.
Personnellement le plus important est de savoir détecter un début de phase de dépression bipolaire le plus rapidement possible avant que tout s’effondre autour de moi. C’est grâce à la parole et à mes routines que j’arrive à tenir, même si mon rythme de travail est parfois plus faible que d’habitude. Pour en savoir plus vous pouvez lire le guide des étapes de l’espoir. Ce que trouve aussi très intéressant est de demander de l’aide rapidement, en contactant sont équipes. (Proches, Psychiatre, Psychologue, Coach…)
Ce qui m’aide beaucoup est d’imaginer le plaisir que je vais ressentir avant de faire une action qui parait insurmontable. Le fait aussi de réduire mes exigences pendant quelques jours en me donnant la possibilité de travailler moins.
👉 Approfondir le sujet de la bipolarité
Le journal de 5 minutes est aussi très utile pour faire taire la voie de la dépression.